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BIOGRAPHY

Illustration sonore

 

Campagne publicitaire Eau Jeune de Gemey
Agence Euro Rscg
Titre : "Get misunderstood"

Générique de l’émission « Les Pieds Sur Terre »
sur France culture du lundi au vendredi à 17H.
Titre : "Get miisunderstood"

BO du film « Décalage horaire »
de Danièle Thomson (2002)
Titre : "Get misunderstood"

 
 

Quand il y a du trouble, il y a du désir

Le premier essai est un coup de maître. Le "Doubts & convictions" des Troublemakers possède l'expressivité des meilleurs productions de la musique électronique actuelle. Le réputé label chicagoan Guidance qui a sorti l’album début 2001 a "entendu juste".

Les "fauteurs de troubles" sont trois : DJ Oil (Lionel Corsini), fibre funk et downtempo, Fred Berthet au background techno, house et électro et Arnaud Taillefer, touche à tout à l'aise dans l'électro-acoustique savante, le hip-hop et les références cinématographiques. Le projet est né à Marseille, métropole industrielle en bord de Méditerranée. Ses lumières, la frénésie urbaine, le port, la proximité de la mer, son activité de grande ville fourmillante, les entrepôts, le métissage et les accents d'un hip-hop maintenant réputé nourrissent souterrainement la création du trio, même si les intéressés se défendent d'être portés par une identité marseillaise : «Notre musique aurait pu voir le jour n'importe où» assurent-ils. Maison ne les croit qu’à moitié.

Pour ceux que l’on surnomme aujourd’hui familièrement les “Trouble”, l'intérêt de Guidance, au catalogue principalement house, a été au départ une surprise. C’est dire le coup de foudre qu’ont eu les américains pour leur première réalisation. Les Troublemakers ne sont en effet que le deuxième groupe a être produits sur Guidance pour un album. Un label américain ? : «c'est un peu délicat à gérer, mais nous avons rapidement saisi la possibilité de nous démarquer du "phénomène french-touch» analyse DJ Oil.

Le caractère organique et aéré de ses compositions confère à Doubts & convictions une richesse, une profondeur et une immédiateté émotionnelle rares. Cette maîtrise réside dans une grande inspiration pour les rythmiques mesurées de sonorités jazz et les atmosphères acoustiques qui les lient aux musiques noires des 60’s et des 70’s ainsi qu’aux fameux soundtracks de la blaxpoitation US. Ce matériau dense se laisse posséder par une vigueur électro, cool et contemplative, qui sait passer la vitesse supérieure et trouver une chaleur funk engageante. L’album est remarquable par son inspiration et son homogénéité. On s’étonne d’ailleurs que les trois ne se connaissaient pas au début de leur collaboration : « on se sentait juste complémentaires ». Le registre éclectique de Doubts & convictions s'étend avec concision de la volupté d'un lounge façon jazz Blue Note seventies aux montées d'adrénaline urbaines, comme chez DJ Shadow, Kruder & Dorfmeister et les artistes du label allemand Compost, influences avouées, ou déjà classiques, ceux de Ninja Tune et Mo' Wax, qui ont posé leur empreinte dans la musique actuelle. Et cette mixture est franchement teintée d’une sophistication, qu’on qualifiera d’«à la française»…

Avec ce premier album, simplement et logiquement, les Troublemakers se sont imposés. Et ont squatté l’horizon convoité des musiques électroniques. Leurs compositions ont tranquillement parsemé le High Fidelity Lounge de Guidance, la fameuse compilation Hôtel Costes ou les samplers des publications françaises de référence Technikart et Trax. Superbement illustratifs et d’une grande intensité, les morceaux ont fait le bonheur des fonds sonores de documentaires, reportages et autres génériques audio-visuels. Un signe qui ne trompe pas sur le caractère incontournable des Troublemakers aujourd’hui. Dans l’intervalle, le trio a acquis ses galons de remixers au contact des œuvres de Tony Allen ou de leurs collègues marseillais Dupain. Et s’est investi dans des projets personnels comme DJ Oil avec Magic Malik ou Fred Berthet avec Copyshop, en collaboration avec Geisha, jeune pousse de la musique électronique. Côté scène, le show visuel conçu avec leur équipe artistique les situent en France comme un des premiers groupes électroniques à se soucier aussi rigoureusement de l’impact que peuvent apporter les images au live, grâce à deux VJ’s (dont un qu’ils partagent avec “Rinôcérôse”) et un travail élaboré de lumières.

Si Play It Again Same ressort Doubts & Convictions en février 2002, c’est que les professionnels pressentaient qu’on n’était pas encore venu à bout de ce disque ! Que l’œuvre n’était pas un article périssable généré par l’industrie du disque mais un produit culturel riche dont la pérennité s’affirme, toujours plus forte et organique, au fil des écoutes. C'est la nature, le secret de ce "trouble" qu’Arnaud Taillefer, Fred Berthet et DJ Oil ont le désir d'instiller et qui est leur signature.

Hervé Lucien, février 2002